Bahá’í World/Volume 8/An Interview with A. L. M. Nicolas of Paris
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AN INTERVIEW WITH A. L. M. NICOLAS OF PARIS
TRANSLATOR OF MANY IMPORTANT WORKS OF THE BÁB*
BY EDITH SANDERSON
A. L. M. Nicolas, after having passed the greater part of his life in Írán, now lives in a pleasant corner of Paris in the rue George Sand, surrounded by his books and his souvenirs of the Orient. For some years the Bahá’ís of Paris have entertained the most cordial relations with him and to him is due their gratitude and appreciation for the courtesy of the following interview which was sought by Miss Edith Sanderson expressly for the Bahá’í World. The interview took place on February 7, 1939.
Quels furent vos débuts en Perse?
Je suis né à Rasht Gílán, province de la rive occidentale de la Caspienne. Je ne parlais que le Persan et le Russe. Quand je vins en France j’étais habillé en cosaque.
Mes débuts en Írán (Perse) n’ont rien d’extraordinaire: ceux d’un jeune homme ardent, desireux de s’instruire.
Mon père était premier interpréte de la Legation de France en Perse, poste que j’ai rempli également plus tard.
De quelle façon vous êtes-vous trouvé en rapport avec les Bábís?
"Gobineau, arrivant à la Légation, très imbu des préjugés diplomatiques, méprisant ses collaborateurs, entra en lutte avec mon père au sujet d’un manuscrit acheté par celui-ci à un courtier. Mon père me fit à ce propos des remarques qui m’orientèrent vers l’idée de vérifier par moi-même le fond des choses. Dans ses papiers il laissa une critique de ce livre de Gobineau: ‘Les Religions et les Philosophie dans l’Asie Centrale,’ qui m’incita à en rechercher et réfuter les erreurs, cet ouvrage ayant été écrit sans données suffissantes avec l’aide d’un Israëlite que Gobineau avait comme professeur de persan et qui ne pouvait apprendre à son élève que le peu qu’il savait de la secte. Je me documentai largement, grâce au secrétaire indigène, Mírzá Ebrahim, de Ṭihrán, que je découvris être Bahá’í et qui me mit en rapport avec les sectateurs.”
Comment vous êtes-vous interessé à la Cause du Báb, au Báb Lui-meme? Qu’est-ce qui vous a amené à traduire Ses oeuvres? À écrire votre livre “Siyyid ‘Alí-Muḥammad, dit le Báb?”
“J’avais résolu de traduire le Bayán Persan. J’avoue que pendant les deux or trois ans que dura mon étude je fus souvent ébloui par les explications que le Báb nous donne sur certains mystères tels que la mort, la résurrection, le Sirat—ce pont qui surpasse l’enfer, fin comme un cheveu, tranchant comme un rasoir, et que le croyant traverse avec la rapidité de l’éclair. Ces explications me plurent et je m’enfonçai de plus en plus dans mes travaux. Il ne me resta plus qu’a regretter d’avoir négligé la traduction de la majorité des écrits sortis de la plume du Prophete.
“De même, lisant le ‘Livre des Sept Preuves,’ que j’ai traduit, j’ai été séduit par la clarté du raisonnement du Báb. J’étais aidé dans mon travail par un jeune Persan et chaque jour nous allions l’après midi nous promener hors de la ville en sortant par la porte du Chimran. La pureté de l’air, la sérénité, la douceur de la température et, à certaines saisons, le parfum des acacias prédisposaient mon âme à la paix et à la douceur. Les réflexions que je me faisais sur l’étrange livre que je traduisais m’envahirent d’une espèce d’ivresse et je devins peu à peu profondément et uniquement Bábí.
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*A. L. M. Nicolas, so long known by the worldwide Bahá’í Community for his association in Írán with some of the early followers of the Báb, and his translations of His Writings into the French language, accorded to Miss Edith Sanderson in Paris just before his recent demise, the interview which is here reproduced. This interview took place Feb. 7, 1939.
A. L. M. Nicolas
Plus je me plongeais dans ces réflexions plus j’admirais la hauteur du génie de celui qui, ne à Shíráz, avait rêvé de soulever le monde musulman, et l’explication du sens des mots de la croyance Shiite m’entraina petit à petit à écrire ‘Siyyid ‘Alí-Muḥammad, dit le Báb.’
"Je voulais naturellement parfaire mon ouvrage et cela m’amena à des recherches et à des conversations avec des Bábís—de fait des Azalis et des Bahá’ís. Je trouvai devant moi une mine abondante et que je n’ai pas épuisée car il y à des oeuvres du Báb que je n’ai pas affleurées.”
Comment vos publications ont-elles été d’abord accueillies?
“Je n’ai guère pu rendre compte.
“Un jeune Persan m’avait dit que les Bahá’ís approuvaient mes travaux, mais que j’avais tort de traduire le Bayán, deja abroge, plutôt que l’Íqán.
“Cette même remarque a été faite par M. Hippolyte Dreyfus dans un de ses ouvrages.
“Au cours de l’été de 1906 j’ai rencontré M. Dreyfus en même temps que Mme. Lacheney et Miss Laura Barney: ils etaient les premiers Bahá’ís français et americains voyageant en Írán.
"J’ai connu aussi le Professeur Browne de l’Université de Cambridge et diné avec lui à la Légation de France. C’était avant sa visite à Bahá’u’lláh a Bahjí, près de Saint-Jean d’Acre (‘Akká). J’aurais pu le mettre en rapport avec des Bahá’ís s’il n’était resté silencieux à ce sujet.
“Au Suédois Christiansen j’ai présenté un Siyyid, ce qui lui à permis d’écrire ses ‘Contes Persans.’
“Mes travaux sur l’oeuvre du Báb m’ont amené à être en contradiction avec le Baron Rosen qui avait publié des extraits des oeuvrages
The First Bahá’í Summer School of India Held at Simla
In the center is Martha Root, beloved teacher of the Faith throughout East and West, who was touring India and Burma.
du Báb: le Baron Rosen considerait que si on changeait légèrement la signification des mots du Báb en le traduisant on arrivait à mieux le faire comprendre. Ma connaissance complète de la langue persane me permettait de trouver un sens éclatant de vérité dans la traduction intégrale des paroles du Báb.”
Pensez—vous que les enseignements du Báb s’adaptent aux temps modernes?
“Parfaitment, à la condition cependant que les Temps Modernes s’adaptent aux décisions du Báb.”
Croyez-vous à la portée mondiale de la Révélation du Báb?
"Je ne vois aucune raison à ce que le monde ne se soumette pas à la Révélation du Báb. ‘Il est difficile,’ dit le proverbe français, ‘de satisfaire tout le monde et son père.’ Mais la raison finit toujours par avoir raison.”
Miss Sanderson ajoute que “Les Bahá’ís doivent beaucoup à l’oeuvre de M. A. L. M. Nicolas, car cet érudit à traduit en français les écrits suivants du Báb, ce qui permet une étude plus approfondie de ce remarquable personnage et de sa révélation vivifiante:
- Bayán Persan, 4 volumes.1
- Bayán Arabe.2
- Les Sept Preuves du Báb.3
- M. Nicolas est connu aussi par les orientalistes pour ses "Essais sur le Cheikhisme,” en quatre fascicules.4
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1Chez Paul Geuthner, 13, rue Jacob, Paris 6e, France.
2Á la Libriaire Ernest Leroux, 206 Boulevard St. Germain, Paris, 6e.
3Chez Maisonneuve Frères, 3 rue Sabot, Paris.
4Chez Paul Geuthner, 13 rue Jacob, Paris 6e, France.