Bahá’í World/Volume 8/Essai sur les Difiérentes Formes de Prières
6.
ESSAI SUR LES DIFFÉRENTES FORMES DE PRIÈRES
BY LUCIEN L. MIGETTE
La prière est "une conversation avec Dieu,” dit ‘Abdu’l-Bahá
LA prière est le chemin direct pour approcher Dieu. Quelle soit constituée de pur langage spirituel jailli spontanément de l’âme, soit de paroles humaines, quelle soit action, elle demeure l’effort par excellence pour trouver le contact divin, la station la plus exaltante pour l’âme avide de s’élever vers son Créateur.
Sans considération de sa forme ni de son but, elle est “le langage de l’esprit” et du coeur (parole d‘Abdu’l-Bahá) qui, montant par le canal du Saint-Esprit et au travers de la Manifestation divine, atteint Dieu.
Toute la création prie en fait. Le Maître nous dit que "la plupart des créatures le font sans le savoir.” En effet, les créatures autres que les hommes conscients prient inconsciemment selon leurs facultés; c’es-t presque une prière-réflexe: une rose baignée par les rayons solaires et arrosée d’une pluie bienfaisante s’épanouit gracieusement en couleurs, émettant en retour un subtil parfum; il s’élève comme une louange, une action de grâce vers celui qui l’a provoqué. La rose, inconsciente créature, prisonnière de sa sphère étroite d’activité, remercie Dieu de Ses dons-le soleil et l’eau-par sa beauté et son parfum. Sans intelligence, sans volonté, elle accomplit son destin: adorer le Créateur par son épanouissement. Elle ne peut éviter de l’accomplir, elle n’est pas libre; et si elle ne s’épnouit, elle meurt.
A l’homme, être mystérieux si essentiellement différent de tout le reste de la création, être conscient et libre, intelligent, doué de compréhension et pourvu d’une si large sphère d’activité, est conféré un semblable destin dans un degré plus élevé, destin à accomplir consciemment et volontairement. L’homme ne peut jamais connaêtre le degré de profondeur de sa prière, sa valeur; mais elle peut être consciente, volontaire, joyeuse, désintéressée, reconnaissante, en un mot, porter tous les attributs dont il est riche par les dons spéciaux reçus du Créateur.
Au point de vue subjectif, on peut faire deux grandes divisions: la prière individuelle et la prière collective.
Individuelle, elle affecte autant d’aspects divers que d’individus et parmi chaque individu, présente autant de genres que de sujets.
Dans ses objectifs variês, elle demande, elle supplie, elle remercie, elle glorifie, elle donne.
Elle s’exhale en pensées, en méditations, en paroles, en actions, en émotions spirituelles, etc.
Pour l’homme aussi, il existe une prière inconsciente; l’artiste livré tout entier à son art sans penser à Dieu l’Auteur de tous les arts, Le loue sans s’en douter par son admiration; le savant même matérialiste qui étudie la nature, s’émerveille des phénomènes, mentionne l’oeuvre sans nommer son Créateur et même s’il le nie.
Ceux qui ne prient pas volontairement mettent quand même à jour des oeuvres de valeur par le fruit de leur travail; c’est une loi: un effort a toujours de la valeur et ces découvertes sont susceptibles d’amener du bien pour tous. Mais la véritable prière est consciente. C’est celle qui admire, qui aime et s’incline en travaillant devant le Créateur de tout et de tous. Alors, comme la rose qui s’étale, l’homme réfléchit en adoration vers son Père, les splendeurs qu’il a reçuesde Lui.
L’homme doit employer les deux formes de prières suivant les cas. La forme individuelle est aujourd’hui ordonnée par Bahá’u’lláh pour l’évolution particulière de chaque âme; on peut concevoir plusieurs raisons à cette ordonnance: 1° Peut-être à cause des degrés d’évolution différents de chaque individu; chacun prie suivant ses capacités, ses
Annual gathering of Bahá’ís at the commemorative service for Thornton Chase, the first believer of America. Inglewood, California, September 30th, 1939.
connaissances, son état intérieur, les buts qu’il se propose; chacun emploie le moyen particulier propre à l’élever le mieux.
2° Peut-être à cause des cristallisations inévitables qu’entraîent la prière en commun; dans cette circonstance, on est en effet obligé d’adopter une formule déterminée, purement humaine jusqu’ici et toujours la même. C’est une prière cristallisée; elle vit moins qu’une inspiration spontanée jaillie du coeur; la prière, relation avec l’Essence de la vie, doit être essentiellement vivante et presque créée à l’instant où on l’exhale. Les prières révélées par les Manifestations divines ont seules ce don de conserver leur esprit vivant.
3° Enfin, à cause des désaccords et querelles provoqués par les goûts individuels. Chaque être, touché plus spécialement par une forme qui lui convient désire l’imposer; ces aspects prennent alors tellement d’importance que les querelles effacent l’efficacité des prières.
“Il vous a été ordonné de prier seuls et le commandement de réunion est abrogé sauf dans la prière des morts,” dit Bahá’u’lláh.
Comment expliquer cette exception? Devant le mystère de l’au-delà où nous n’avons aucune entrée tant que nous sommes de ce monde, nous sommes forcés de nous arrêter muets, ignorants, réconciliés par le chagrin d’une perte commune; il n’est plus question de connaissances, de préférences, de supériorités; tous égaux dans notre ignorance, il ne nous reste plus que l’alternative d’une supplication commune, indéterminée mais plus puissante par notre union, afin que la miséricorde divine entoure l’étre cher qui disparait.
Dans quel état devons-nous nous récueillir pour une conversation avec Dieu? Dans une détente, un apaisement, un détachement les plus parfaits possibles. ‘Abdu’l-Bahá nous décrit cet état: “c’est le langage de l’esprit qui parle à Dieu; quand dans la prière, nous sommes libérés de toutes les choses extérieures et nous tournons vers Dieu, alors, c’est comme si, en nos coeurs, nous entendions la voix de Dieu. Nous parlons sans paroles, nous communiquons, nous conversons avec Dieu et entendons la réponse . . . chacun de nous, quand il atteint un état vraiment spirituel, peut entendre la voix de Dieu.” (Extrait d’une conversation avec ‘Abdu’l-Bahá relatée par Miss Ethel Rosenberg.)
Un tel état d’abandon et de spontanéité nécessite pour se rapprocher de la perfection, la solitude. Parfois, l’élan de l’âme peut devenir tel que le corps lui—même le traduit par un geste involontaire. La prière pour être profonde et complète, doit être libre et elle ne peut l’être que dans la solitude.
Au point de vue objectif, on emploie toutes les formes abstraites et concrètes, pensées et actions.
La prière prend un nom différent suivant le but à atteindre: la supplication demande un secours physique ou moral, ou la force de vaincre une nature défectueuse; on peut désirer simplement se plonger dans la mer de bonté pour rafraîchir son àme. Parfois, c’est la recherche d’une inspiration pour résoudre un problème difficile, cas de conduite embarràssant. Parfois encore, c’est l’effort de toutes nos facultés mentales pour dévoiler et assimiler les mystéres cachés de la création; c’est ici le stade de la méditation.
Ces diverses prières pensées sont indispensables à notre évolution spirituelle; celles qui glorifient Dieu sont justes bien qu’Il n’en soit aucunement affecté en bien ni en mal dans Sa Majesté immuable et connue de Lui seul.
Celles qui supplient le Tout-Puissant sont normales. Dieu connait certes nos besoins, mais Il nous a laissé dans le choix motivé de nos prières, une certaine liberté: nous pouvons aussi bien demander la sagesse que la richesse, souvenons-nous de la prière de Salomon. Il faut exposer ses voeux; Dieu les voit et Il sait les meilleures choses pour nous, mais peut-être, ce geste volontaire de notre part est-il nécessaire pour mieux apprécier la faveur d’être exaucé.
La méditation est la concentration de l’esprit sur divers sujets, suivie de réflexion.
Par la concentration en soi-même, puis la réflexion, on connait ses faiblesses; par sa connaissance, on peut se modifier, dévoiler ce germe spirituel enfoui en nous, se dépouiller des défauts qui l’empêchent de se manifester et par cet effort, glorifier le don divin.
Dans un autre domaine, c’est aussi en méditant que l’on conçoit les oeuvres d’art, que l’on ébauche intuitivement les hypothèses
grandioses qui verront plus tard leurs vérifications dans des réalisations pratiques. Ce genre de méditation s’élève au rang de prière si l’idée de servir Dieu et nos frères la domine.
Par la méditation encore, nous approchons les mystères divins et nous pouvons les percer avec la permission de Dieu. Mahomet a dit: “la prière est une échelle par laquelle l’homme peut monter au ciel.”
En nous existe toute une richesse inconnue; elle y est enfouie et ne se découvre que peu à peu par l’évolution. Bahá’u’lláh, dans la tablette des Sept Vallées nous déclare: “rendons grâce à Celui qui a gravé les antiques mystères sur la tablette de l’homme. "Ailleurs: “o fils de l’existence, J’ai placé sur toi l’essence de Ma lumière, aie confiance en elle et en rien d’autre . . .” puis: “Je t’ai créé riche . . . Je t’ai fait noble . . .” et encore: "tourne ton regard en toi-même, afin de Me trouver au-dedans de toi, Puissant, Omnipotent Suprême.” et enfin: “O mon serviteur, tu es comme l’épée de la trempe la plus rare et du plus pur éclat enfermée en un sombre fourreau ce qui fait que sa qualité demeure cachée à son artisan même. Sors du fourreau du moi et du désir, afin que ton éclat resplendisse et se manifeste au monde entier.” Et c’est seulement dans la méditation que l’on arrive à pressentir les grandes vérités spirituelles. Bahá’u’lláh ajoute: “la langue est impuissante à décrire les splendeurs des dernières vallées. La plume n’y parviendra jamais, seule l’âme peut les dire à l’âme et le coeur au coeur.”
Dans tous ces cas, l’homme emploie tantôt ses propres paroles, tantôt une prière révélée. Jamais, dans aucune révélation du passé parvenue jusqu’a nous, une telle variété et richesse de prières ne fut répandue sur le monde. S’il acceptait, certes en un clein d’oeil, il pourrait guérir toutes ses maladies. On conçoit sans peine quoiqu’ incomplètement, combien elles doivent être parfaites dans leurs formes et dans leurs buts. A la sincérité du suppliant s’ajoute alors la puissance du Verbe divin révélé. Et l’homme, sans en comprendre en son ampleur toute l’auguste puissànce potentielle, comme un enfant jouant avec un levier immense, voit s’accomplir sous ses yeux le déploiement de leur inexorable et prodigieuse action.
Mais aujourd’hui le monde ne connait pas encore toutes ces prières; incidemment, un cas peut demeurer imprévu; que l’âme se soulève alors d’une façon spontanée, avec ses propres paroles, avec ses aspirations; toutes les formes de prières, Dieu les accueille et les bénit; mais pour que ces prières soient directes et portent rapidement leurs fruits, il ne faut jamais omettre de les Lui adresser au travers de Sa Divine Manifestation, canal mystérieux créé dans ce but par Lui-Même. Sans doute est-ce là le secret des fruits plus ou moins grands que nous en recueillons, dans un délai plus ou moins rapide.
La prière en actions est multiple; d’une simple aumône faite à un mendiant, elle s’élève jusqu’au sacrifice de sa vie dans le chemin de lumière. L’action est la forme plus ou moins matérialisée de la prière; faire l’aumône c’est prier pour soulager le pauvre; travailler c’est prier pour le progrès; réconforter le désespéré c’est prier pour son bonheur; soigner le malade, c’est prier pour sa santé; enseigner les vérités divines, c’est prier pour que les êtres connaissent vraiment Dieu.
Chacun des actes de la vie peut devenir prière si le croyant l’effectue en l’associant à son amour de Dieu. Telle idée jaillie du cerveau de l’homme peut se réaliser pratiquement en prière s’il le désire. L’artiste réalise la beauté, le savant la science; si la création de l’oeuvre d’art, si la découverte scientifique sont effectuées pour louer Dieu, elles de viennent prières. ‘Abdu’l-Bahá dit: “dans la Cause bahaie, les arts, les sciences et tous les métiers sont considérés comme adoration."
Certaines prières en forme d’action prouvent la sincérité des prières verbales ou pensées, elles en sont l’indispensable suite. Si nous prions pour nous corriger d’un défaut, par exemple l’avarice, où est la sincérité de notre désir de changer si cette supplication n’est pas immédiatement suivie par un acte de charité? Si nous priions par cette double voix chaque fois que celà est possible, combien nos progrès seraient rapides; la forme concrète confirmant la forme abstraitè porterait les plus belles bénédictions et les plus beaux fruits. Supposons un professeur enseignant les vérités divines; il prie pour éclairer les êtres, il leur prête quelques lectures; puis, comme un moucheron, s’en va voler bien vite vers d’autres et recommence;
le résultat ne peut étre maximum; en effet, il doit certes prier en paroles, prêter des lectures, mais aussi expliquer patiemment et commenter, saisir toutes occasions de leur rendre service, les soigner peut-être; s’il est loin d’eux, il doit correspondre, s’il le peut, voyager vers eux; peut-être ainsi sa prière sera-t-elle complète en toutes ses formes. Dans les paroles de sagesse, Bahá’u’lláh nous dit: “la vérité des pàroles est éprouvée par les actes,” et ces mots peuvent s’appliquer a la prière.
Une autre forme très haute, si haute qu’elle est choisie par les Sources de lumière divine est la souffrance. Le sacrifice de soi est la prière ardente, parfaite, efficace par excellence; elle est la reddition complète de son être pour sauver l’humanité. N’est-ce pas une longue et tragique supplication que les vies de ces grands Etres cruellement torturés au point de vue physique et spirituel, cette acceptation, cette recherche même des calamités les plus terribles avec joie, avec amour, tandis qu’Ils ont encore la force et la maîtrise de proclamer la Révélation des vérités régénératrices du monde? Quels exemples de force Ils nous donnent pour supporter à notre tour dans Leur chemin, un peu de cette souffrance. Endurer les railleries, les vexations, les humiliations des méchants, comme supporter les tortures physiques au nom de la vérité est peut—être pour nous humains la forme la plus puissante de la prière, mais sans doute aussi la plus laborieuse; ne sonce pas en effet grâce à ces héros de la premiere heure, à leur sacrifice complet et instantanément consenti que nous devons aujourd’hui cette lumière dispensatrice déjà largement répandue par le monde?
Il est permis de prier en tous lieux, car Dieu entend toujours Ses enfants. Il n’est pas indispensable de se rendre chaque fois dans le Temple. Cependant il y eut toujours des temples destinés à l’adoration de l’Etre Suprême. Et aujourd’hui encore, Bahá’u’lláh ordonne: "certes, un Mashriqu’l-Adhkár est toute maison consacrée á Ma Mention dans les villes et les villages.”
Les temples du passé furent conçus suivant les esprits, les cultures par des hommes plus ou moins inspirés. La plupart des formes d’adoration fut imposées aux croyants par des prêtres, prières individuelles et cérémonies collectives. Et il existe dans toute ville importante beaucoup d’eglises de toutes les confessions. Pour la premiere fois dans l’histoire du monde où nous évoluons, un temple est construit destiné à ouvrir ses portes à toutes les prières quelque soit la source de la foi qui les inspire. Un seul Temple suffira donc, une unique maison de Dieu dans chaque ville. Dans son enceinte immense et vide, chaque être élèvera son âme librement inspirée vers le Créateur, sans obligation dogmatique imposée; la forme rituelle est supprimée et tous les suppliants sont égaux. “Il vous est interdit de monter dans les mimbars,” a dit Bahá’u’lláh, “celui qui voudra lire pour vous les versets de son Seigneur, qu’il s’assoit parmi vous et qu’il mentionne Dieu.” Dieu Seul en effet connait la valeur de chaque prière et peut la juger. Le conseil d’un homme sage et éclairé est judicieux, mais il n’est pas convenable que l’un d’entre les croyants s’élève au-dessus de ses frères pour leur imposer ses goûts personnels même s’il est plus évolué qu’eux.
Mêlant la prière à nos actes ou plutôt faisant de notre vie en tous ses aspects un hommage à Dieu, l’humanité construira autour du temple ses dépendances pour les oeuvres sociales. Ainsi jamais le croyant ne pourra séparer l’action de la pensée. Constamment vivantes dans de solides corps de ciment, les institutions lui approndront à incarner visiblement sa pensée abstraite. Ce que les hommes ont conçus comme oeuvres humanitaires et bienfaisantes aujourd’hui imparfaites, insuffisantes, tàtonnantes, deviendront par la volonté et l’aide de Dieu Lui-Même, splendidement efficaces. Car ces actes seront considérés maintenant comme des prières.
Telle est la nouvelle forme collective de la prière pour l’humanité future. En tout ce qui concerne l’intérêt général, sans aucun doute est-il permis de l’employer. Un seul homme priant pour la paix du monde peut-il l’obtenir? Non, mais tous les hommes unis seront sùrs d’être exaucés. L’union, de leurs supplications dégagera une force inouie qui rejaillira sur eux en lumière, leur dévoilant les vrais moyens de rapprocher les peuples. Le Mashriqu’l-Adhkár, Maison unique d’adoration ne peut-il également retentir de l’ensemble des chants de louange de la terre
entière vers son Créateur? La glorification et la mention de Dieu doit se faire au-dessus de toute idée, toute opinion, en union complète de coeur et d’esprit; devant Lui tout s’incline; l’idée suprême de Son existence peut à elle seule dominer à ce point l’humanité qu’enfin harmonisée pour un instant, elle devienne une seule cellule rythmant de souffle de vie.
Enfin un homme isolé ne peut entreprendre une oeuvre sociale; tous sont indispensables à ce travail; alors seulement ils seront forts, ils réussiront à supprimer les détresses, maladies, pauvretés, désespoirs du monde. Les oeuvres sociales doivent devenir des prières collectives. C’est une bénédiction divine que Dieu nous ait tracé par la Plume tout-puissante de Bahá’u’lláh, un plan parfait en cette matière.
En effet, gagnés par la pitié pour les êtres pauvres, malheureux, les hommes ont déjà entrepris bien des améliorations pour les grands, pour les petits les déshérités; mais il y a trop de petites oeuvres dispersées; temps et argent ne donnent pas encore leur maximum de rendement; il est nécessaire de réaliser la fusion de toutes ces entreprises partielles. Lesquelles y consentiront? Aucune, si ce n’est que Dieu l’ordonne, si ce n’est que Dieu décrète que toute oeuvre sociale est une prière.
On pourrait s’inquiéter et penser: que de formes multiples, quelle est donc la meilleure? Estce-la prière individuelle et parmi ses aspects la pensée personnelle, la prière révélée, l’action charitable? Est-ce la prière collective? l’adoration dans le temple, l’oeuvre sociale? Est-ce la consécration de ses efforts à l’art ou à la science? Il n’y a pas de degré dans ces formes; comment séparer ce qui devrait être l’écoulement naturel de notre vie? Par les fibres de tout notre être, par toutes nos facultés, ne pouvons-nous vivre dans ce chemin chaque jour? Ne pouvonsnous, par une division harmonieuse de notre temps, aidés de l’inspiration du Saint-Esprit vivre tous les genres de prières suivant les circonstances? Puisqu’il suffit de l’effort et du désir de servir, pourquoi ne pas transformer nos pensées, nos actes en cet esprit? Toute pensée belle ou bonne peut devenir prière. D’aprés ‘Abdu’l-Bahá, toute mauvaise pensée produit des calamités (révolutions, guerres) toute bonne pensée produit donc un évènement heureux.
Il n’est pas nécessaire de consacrer des heures à la forme abstraite ‘Abdu’l-Bahá nous dit: “priez sans lasser vos âmes, mais pour les rafraîchir.” Accomplissons notre travail de chaque jour avec l’esprit de louange; à chaque occasion de rencontre avec un malheureux, remercions la Providence divine de semer sur notre chemin l’opportunité de la prière en action. Consacrons une petite partie de notre temps aux oeuvres sociales. Ainsi comprise, la vie nouvelle ne doit pas nous apparaitre remplie de difficultés insurmontables; elle ne nécessite pas un bouleversement complet de nos habitudes.
La prière ne rend ni grave, ni monotone, ni ascétique. Donnant le meilleur contact avec la Source de vie, elle n’est ni triste ni douloureuse; son rôle au contraire est de tuer toute faiblesse et toute souffrance.
L’essentiel est de demeurer bien équilibré dans nos travaux, nous souvenant que nous sommes seulement des êtres humains limités; c’est une erreur de rechercher bien loin des actions difficiles, éclatantes, disproportionnées avec notre temps et nos forces, croyant par ce fait accomplir de magnifiques prières. Ne cherchons pas les miracles; ils ne se produisent qu’en dehors de nos désirs. Parfois, un acte excessivement simple est accompli obscurément, mais d’un seul élan du coeur, presque sans réflexion; soudain, cet humble geste prend une répercussion immense, produit un enchainement d’évènements sans proportions avec le point initial et si importants que l’homme, ne pouvant suivre le cheminement de forces qu’il ne connait pas encore . . . crie au miracle. C’est autour de soi qu’il faut regarder, à chaque instant avec simplicité. Les actions humbles et obscures sont des prières au même titre que les actions d’éclat.
La plus belle parole d‘Abdu’l-Bahá pour terminer: "Que mon service soit tel que. Tu puisses l’accepter.”